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L'ESPACE AU CINEMA (Hors-champ, hors-d’œuvre, Hors-jeu)

Louis Seguin 1999

Editions Ombres / Cinéma 1999 (Toulouse France) 123 pages



La précision, la richesse et la diversité des références historiques et théoriques utilisées par Louis Seguin ne nous permettent pas encore d’assimiler complètement sa portée théorique, c’est pour cela que cette fiche de lecture possède une valeur plus synthétique que critique. Nous avons sélectionné et synthétisé certaines des idées développées dans chaque chapitre en gardant la structure du livre. Malheureusement réduite, cette fiche de lecture ne peut rendre compte de la richesse de cet ouvrage mais peut être peut-elle s’approcher timidement de la thèse générale qui semble animer Louis Seguin : proposer une mise à jour de la théorie du cinéma, en remettant en question les acquis théoriques des notions d’espace, de cadre et de hors-champ. Louis Seguin va ouvrir la réflexion a des références interdisciplinaires : histoire, histoire de l’art, géographie, philosophie, cinéma, peinture, gravure, poésie, théâtre, psychanalyse, étymologie et linguistique. En s’appuyant particulièrement sur les écrits d’André Bazin et de Gilles Deleuze, Louis Seguin propose de réduire l’importance du hors-champ dans la théorie du cinéma. Pour Seguin le hors-champ est une construction théorique qui a permis d’appréhender l’espace au cinéma, mais cette conceptualisation a pris trop d’importance, elle a dominé les recherches théoriques sur le cinéma jusqu’à se poser comme un élément constitutif de celui-ci. Le hors-champ est devenu un cadre théorique rigide. Seguin s’attache à montrer que le hors-champ ou hors-d’œuvre n’est pas propre au cinéma, il ne lui appartient pas. Le hors-champ prend la forme d’un simple outil voir d’un subterfuge. C’est, comme le prédit le titre, la notion d’Espace longtemps effacée par la notion de Temps qui devrait prendre cette position dominante dans la théorie du cinéma. L’espace au cinéma, c’est d’abord l’écran.

« Le hors-champ est l’anesthésique de la théorie, un moyen de fuir » « Le hors-champ n’est pas réflexif »

« La théorie et même la critique n’ont pas toujours su se dépêtrer de la matérialité de la mise en scène, de son épaisseur et surtout de sa polysémie »

« Le cinéma, une fois encore, n’est pas là pour jouer à cache-cache mais pour montrer, au beau milieu de son espace, de son écran »

« Au cinéma tout est sur l’écran et nulle part ailleurs. Le spectateur n’a pas le choix (...) il n’y a rien devant lui que ce qui force l’espace du cadre »


CHAPITRE 1

« Les Maitres du temps » p11

Pour approcher l’espace au cinéma, Louis Seguin remet le concept d’espace dans l’histoire de la pensée. Dans ce contexte particulier, le concept d’espace a toujours été en retrait par rapport au concept de temps. Le temps est pour Louis Seguin l’héritier de la pensée. Le temps exerce une certaine autorité sur l’espace car la philosophie a du mal à appréhender l’espace, elle se perd dans son épaisseur. L’espace est contenu, la pensée a beaucoup de mal à se défaire du temps, de la durée.

3 exemples de cette dichotomie temps - espace dans la pensée philosophique :

  • René Descartes

Le temps nous appartient parce qu’il nous contient, tandis que l’espace, même si on peut essayer de l’agripper par les attributs de l’occupation et de l’exclusion, nous échappe.

  • Baruch Spinoza

La place de la pensée et de l’étendue, tout est dans tout réciproquement. Une réciprocité qui implique une immobilité, qui n’arrive pas à se défaire du temps. L’espace sous-entend une politique de la coexistence avec le temps, à la manière d’une persistance rétinienne ?

  • Emmanuel Kant

Le temps et l’espace sont des connaissances a priori. Indépendantes de l’expérience elles sont nécessaires et universelles, antérieures a nous-même. Elles sont des notions crées par notre sens interne qui est le moyen par lequel l’esprit intuitionne son état intérieur. Le temps ne peut être intuitionné extérieurement. L’espace ne peut être intuitionné intérieurement. Le temps s’attache à l’intérieur, à la pensée et l’espace s’attache à l’extérieur, au corps.

Pour Louis Seguin ces deux concepts ne s’opposent pas, ils sont réciproques et cette réciprocité s’exprime dans la notion de mouvement. Le mouvement, le changement de lieu n’est possible qu’avec le temps, qu’avec une inscription dans la durée. Le mouvement et l’inscription dans le temps sont les éléments constitutifs de la cinématographie.


CHAPITRE 2

« L’Invention du hors-champ » p18 Louis Seguin va interroger la notion d’espace et de hors-champ à travers les textes théoriques d’André Bazin, puis de Gilles Deleuze. Dans l’histoire de la théorie du cinéma, André Bazin est le premier à se préoccuper de la notion d’espace. Il va l’interroger à travers 3 textes fondateurs :

« Montage interdit » (1953-57)

Pour André Bazin, le réalisme au cinéma réside dans l’homogénéité de l’espace, et cette homogénéité peut se voir altérer par le montage. L’unité spatiale de l’évènement représenté doit être respectée pour éviter de transformer la réalité en une simple représentation imaginaire. Certaines situations n’ont pas besoin de montage. Le montage est interdit quand l’essentiel d’un évènement est dépendant de deux ou plusieurs actions simultanées. L’espace est le lieu privilégié de la simultanéité. Un plan d’ensemble, un plan séquence peuvent être nécessaire pour que l’imaginaire ait sur l’écran la densité spatiale du réel. Mais cette limitation du montage n’est pas une règle fixe, elle dépend de la nature du récit.

« L’Age du cinéma » (1948-51)

Dans ce texte André Bazin introduit une notion politique dans la théorie du cinéma : « La démocratie de la profondeur de champ », qui consiste à regrouper le maximum de personnages et d’actions sur la surface de l’écran. A travers cette diversité, le cinéma propose au spectateur le choix d’habiter et d’inventer sa propre fiction.

« Peinture et cinéma » (1945)

André Bazin oppose la peinture et le cinéma à travers la notion de cadre. Pour Bazin, le tableau n’existe pas sans le cadre, le cadre constitue une zone de désorientation de l’espace. L’espace est orienté en dedans, le cadre possède une force centripète. L’espace contemplatif est seulement ouvert sur l’intérieur du tableau, il n’y a pas de hors-champ possible. En cinéma le cadre devient cache, l’écran prolonge indéfiniment l’espace. L’écran possède une force centrifuge qui pousse au hors-champ, un espace imaginaire infini.

Mais Louis Seguin montre que cette rupture entre la peinture et le cinéma est plus qu’une histoire de cadre. C’est une histoire de perspective. C’est avec l’arrivé de la photographie que les arts plastiques se sont libérés de leur obsession de la ressemblance, sous-tendue par le principe de la perspective. Pour Bazin, la photographie et donc la cinématographie se distingues par leur objectivité essentielle, l’artiste s’efface, comme si l’image se créée d’elle-même. Le spectateur de cinéma n’a plus besoin d’intermédiaire pour accéder à l’image parfaite, le décalque sacré de la réalité. Le cinéma est ici précurseur de l’art contemporain, il introduit une rupture radicale dans l’histoire de l’art en supprimant les intermédiaires et permet d’accéder aux choses mêmes.

Seguin va nous diriger ensuite vers les thèses de Gilles Deleuze. G.Deleuze souligne 3 thèses sur le mouvement, inspiré d’ Henri Bergson :

  • 1- Le mouvement indivisible est distinct de l’espace parcouru divisible. Le mouvement ne peut pas être reconstitué avec des instants et des positions. C’est pour cela que le cinématographe n’écrit pas le mouvement comme il faut, il le transforme en une somme d’instants, d’images (24/s) et de coupes. Le mouvement est reconstruit par la pensée donc par le temps, mais cette reconstitution n’est possible qu’en y joignant l’idée de succession, d’une temporalité homogène et universelle distincte de l’espace.
  • 2- Le mouvement ne peut pas être reconstitué avec des « instants et des positions » Cette reconstitution est erronée a deux niveaux : l’un antique et l’autre moderne – (nous n’avons pas réussi à comprendre cette distinction p24)
  • 3- L’instant est une coupe immobile du mouvement mais le mouvement est une coupe mobile de la durée. Le mouvement exprime quelque chose de plus profond, qui est le changement dans la durée et le tout. La hiérarchie du temps sur l’espace continue. La durée est un cadre qui contient l’espace, le restreint.

Pour Jean Narboni il y a 2 types de cadres, le premier dans le cinéma de Jean Renoir et le second dans le cinéma d’Alfred Hitchcock. Pour Jean Renoir, l’espace et l’action excèdent toujours les limites du cadre qui n’opère qu’un prélèvement sur une aire, le hors champ devient un espace continu et homogène. Dans le cinéma d’Hitchcock le cadre opère un enfermement de toutes les composantes, le hors-champ devient un espace off discontinue et hétérogène, un espace « habité par la mort » (Serge Daney)

Pour Gilles Deleuze Il n’y a pas 2 types de cadres mais deux aspect différents du hors-champ qui renvoie chacun a un mode de cadrage. Tout cadrage détermine un hors champ. Le hors champ préserve sa part d’imaginaire. Il garde un secret qui est la condition même de son existence.


CHAPITRE 3

« Qu’est-ce qu’un cadre » p31

Louis Seguin revient ici sur la notion de cadre et de hors-champ en critiquant l’approche trop restrictive d’André Bazin. Pour Seguin, La notion de cadre dans le travail de Bazin est historiquement réduite à la peinture de chevalet. Bazin ne semble pas prendre en compte la multitude des formes et des configurations que prend l’art tout au long de l’histoire. Seguin prend l’exemple des fresques, qui n’ont pas de frontières a proprement parlé et occupent la totalité de l’espace ou de la surface. La peinture est partout, elle se déplie et refuse la restriction du cadre. Pour Seguin le cadre n’apparait qu’avec l’émergence d’une peinture à la fois plane et mobile, pour qu’elle puisse s’accrocher, se transporter et se vendre. Le cadre prend le relais de la page du livre ou l’illustration se trouve enclose, là encore la limitation n’est pas une généralité, l’illustration déborde souvent sur les lettres. Pour Bazin la composition des peintures s’appuie sur la forme du cadre, jusqu’à l’arrivé des impressionnistes, qui changerons la relation de la peinture avec ses cadres : physiques, théoriques et académiques.


CHAPITRE 4

« Le Péché originel » p40

Louis Seguin discute dans ce chapitre l’hypothèse d’André Bazin, qui désigne la perspective comme le péché originel de la peinture occidentale. Pour Seguin la perspective est une mise en ordre rationnelle du monde de la représentation, mais cette mise en ordre ne s’exprime pas uniquement à travers la perspective. La perspective est une illusion. Une forme différente de mise en ordre existait aussi dans l’art médiéval et roman par exemple. L’art roman, était soumis aux règles rigoureuses d’un espace hiérarchique.

Albrecht Durer par exemple, assujetti le monde et les corps avec un système de grilles, de carrés, (Proche de la cartographie dont Louis Seguin parle très souvent). Un système d’appréhension de l’espace qui diffère de la perspective d’Alberti.

Bazin pense le cinéma comme un système de reproduction, un appareillage capable d’appréhender la vérité, « une machine ontologique apparut un peu par miracle ». Le cinéma serait l’ultime machine, annonçant en quelque sorte la fin de la recherche de la mimesis. Seguin développe l’importance d’une archéologie du cinéma dans la théorie du cinéma, pour montrer que le cinéma existait avant l’invention de cet appareillage filmique. Pour Louis Seguin, le cinéma avant d’être un procédé technique filmique, existe à travers les catégories existantes qui régissent la pensée et les représentations : images et genres, thèmes et cadrages, héros et péripéties, mémoire et mensonge.


CHAPITRE 5

« Histoire de cours : Le Crime de monsieur Lange »

Le cinéma tourne autour de la cour, il s’invente l’espace qu’il va explorer, le cinéma est une géographie. Dans le crime de monsieur Lange, on passe du réel au factice, l’espace du film n’a pas de comptes à rendre à l’espace de la réalité, les décors sont l’exemple de l’exercice du contrôle et de la gestion de l’espace. La camera de Jean Renoir s’adapte à l’espace, à l’expression spatiale de la mise en scène. Le hors-champ fournit ici le chainon manquant de la continuité, comme complice du temps. La topographie des lieux est sacrifiée à la logique du film. Jean Renoir soumet l’espace, le réinvente à chaque plan, il s’éloigne d’un certain réalisme.


CHAPITRE 6

« HISTOIRE DE COUR : Fenêtre sur cour»

Fenêtre sur cour est Un film dont l’espace est clôturé, fermé. L’écran aspire tout, la lumière, les formes, les personnages, la musique, les bruits. Les cadrages très serres (Jumelles) réduisent les gestes, ferme le champ. L’espace du cinéma est le tombeau du mouvement, toujours sous cadre, de l’écran a la fenêtre. Alfred Hitchcock, démontre que le champ et le contre-champ ne sont pas les Hors-Champ l’un de l’autre. Alfred Hitchcock soumet le temps a l’espace et au corps. Pour Alfred Hitchcock et Jean Renoir, ce qui importe au cinéma c’est ce qui se voit. Ils démontrent l’inutilité, donc l’inexistence d’un ailleurs, d’un hors-champ. Le public n’a pas à intervenir pour essayer d’en savoir plus, de trouver plus dans le hors-champ. Intervenir détruit la cohérence du film en melant une moral et une police a ces fantasmes. Il n’y a pas d’espace intermédiaire entre le réel et la fiction ou l’on pourrait se réfugier dans les limbes d’une temporalité. Louis Seguin insiste ici sur les liens qu’entretiennent hors-champ et temps au profit de ce qui se passe sur l’écran, dans l’espace.


CHAPITRE 7

« HORS-D’ŒUVRE, HORS JEU »

« La théorie et même la critique n’ont pas toujours su se dépêtrer de la matérialité de la mise en scène, de son épaisseur et surtout de sa polysémie ». Pour Seguin il existe un danger inhérent dans certains outils et systèmes théoriques qui tentent d’appréhender les œuvres. Il cite notamment Christian Metz, se fabriquant un cinéma factice qui seul saurait le mettre à l’abri de la dangereuse réalité des œuvres. Pour Éric Rohmer, « La nature même de l’écran – espace rectangulaire entièrement rempli qui occupe une portion relativement réduite du champ visuel – conditionne une plastique du geste très différente de celle à laquelle les arts de la scène nous ont habitués ». Le geste de l’acteur de cinéma est devenu provisoirement plus discret, plus ramasse, déformé par la proximité de la bordure de l’écran. Le réalisateur se réservant le pouvoir de l’interrompre au moment où il violerait cet équilibre plastique dont la recherche peut être aussi rigoureusement poursuivie que dans une peinture ou une fresque.

La notion de hors-d’œuvre, que l’on trouve sous le titre est issue de ce chapitre, elle fait référence la notion de parergon. La définition du parergon en hors-d’œuvre vient de Jean Beaufret.

« un parergon vient contre, a cote et en plus de l’ergon (l’œuvre), du travail fait, de l’œuvre mais ne tombe pas à côté, il touche et coopère, depuis un certain dehors, ni simplement dedans. » (Jacques Derrida)

Pour Louis Seguin, la complexité du hors-champ est à penser à travers cette notion de parergon. Le parergon est à la fois le cadre de la peinture et de l’écran, la parure et ce qui entoure l’œuvre. D’abord de manière physique comme dans l’architecture des salles où l’on retrouve une scène, un espace reculé, un rideau, une sorte de cadre autour de l’écran. Puis de manière imaginaire, d’un certain dehors, hors de l’œuvre, d’un ajout. Le hors-champ devenu parergon, est à la fois parure défensive et décorative et cadre perméable entre un certain dedans et un certain dehors. Le hors-champ / parergon inscrit quelque chose qui vient en plus, extérieur au champ propre, mais sans jamais intervenir sur le dedans de l’écran, d’une certaine manière sans jamais réussir à approcher la visibilité propre au cinéma. Jacques Derrida pose le parergon comme incomplet et Louis Seguin renvoie le hors-champ a l’insatisfaction : « il remplit l’espace vide du fantasme ». Un cadre devenu parure (Kant), une parure métaphysique qui enveloppe, protège et contrôle au lieu d’interroger et d’ouvrir. Le hors-champ ne serai qu’une parure pour la théorie du cinéma ?

Louis Seguin reviens vers la psychanalyse à travers notamment la notion de miroir. Les miroirs au cinéma, permettent d’ouvrir une porte dans la fiction, faire apparaitre ou disparaitre des personnages. Le miroir est au cinéma le lieu privilégier de la reconnaissance et de l’identité (Jacques Lacan). Les miroirs referment l’écran sur lui-même, font semblant de découvrir le lien interdit d’où l’on filme, le territoire d’en face. Le miroir creuse, mais ne montre rien. Tout comme le hors-champ, le miroir ne reflète jamais la matérialité du cinéma (la caméra, les techniciens, etc). Louis Seguin rapproche la psychanalyse du hors-champ en ce qu’elle aurait aidé à construire cette espace, a le nommer et a s’en servir. <Le hors-champ semble ici perçu comme un inconscient, dont l’intention serai de coloniser l’espace de l’écran (sans pouvoir y arriver visiblement)> (bancale)


CHAPITRE 8

« LE LASSO DE MONSIEUR LANGE»

L’espace est un concept moderne, en grec il n’a pas d’équivalent, il doit se construire avec deux mots, le lieu et l’intervalle. L’écran de cinéma est à la fois ces deux termes, l’écran s’étend sur le lieu, l’endroit d’une admission et d’un aménagement. Le cinéma est gêné, torturé par le paradoxe de sa fermeture.. Il conçoit le hors- champ comme l’anesthésique de la théorie, un moyen de fuir, ce qui permet de se tranquilliser, de s’endormir, de se retirer loin des inquiétudes et des étrangetés de l’écran. Le hors-champ est une construction théorique qui s’est imposé, et qui a su légitimer sa domination dans la théorie, en partie grâce à la philosophie. Pour Louis Seguin, à l’écran comme en théorie le hors-champ n’est pas réflexif. Le hors champ ignore les impasses de la perspective, les conventions de la scène et les dangers de la frontière. Il pratique une politique de la sécurité. Il revient en arrière sur la fin de la métaphysique pour retrouver le calme de la consolation, pour fuir les contrastes trop vifs de l’ombre et de la lumière.

Pour conclure, nous pouvons dire que Louis Seguin approche la théorie du cinéma avec un fond politique, il milite pour sortir de la domination du Temps sur l’Espace. Une domination philosophique historique qui se retrouve synthétisée dans le concept du hors-champ. La théorie du cinéma doit se dégager de ce carcan idéologique, pour éviter que la réflexion sur l’espace du cinéma ne devienne une réflexion unilatérale sur l’espace du hors-champ. Une réflexion qui s’enferme dans le révolu, dans ces appareils et son économie. L’espace doit donc reprendre sa position de force, le temps du cinéma est un temps mort et le film est l’affaire du passé. Pour Louis Seguin, c’est l’espace qui donne la mesure du temps, il se détache ici à la fois de Bazin et de Deleuze.

Il faut réapprendre à regarder, concevoir et analyser les films sans l’autorité, l’hégémonie du hors- champ et de l’invisible. Louis Seguin finit ce livre en affirmant que « le cinéma n’a pas besoin de Dieu ».

Un ouvrage complexe, structuré par d’innombrables ellipses et vas-et viens référentiels, qu’il est souvent difficile de suivre. Un ouvrage que nous espérons relire, après la lecture et l’éclaircissement de certains des auteurs cités (Bazin, Deleuze, Kant, Derrida pour ne citer qu’eux.).